Sobriété numérique, l’autre levier pour réduire l’impact énergétique et environnemental de votre entreprise

Utilisant de plus en plus de solutions cloud, les entreprises ont tendance à oublier que les outils et les flux numériques sont loin d’être neutres sur le plan énergétique et environnemental. A l’heure où toute réduction de consommation d’énergie compte, la sobriété numérique devient un poste significatif du bilan carbone des entreprises et un volet à part entière de leur politique RSE.
Le numérique a tellement été associé à l’idée de « dématérialisation » et le développement du cloud a tellement invisibilisé les infrastructures IT qu’il a fallu attendre 2018 et les chiffres publiés par le Shift Project (Rapport Lean ICT : Pour une sobriété numérique) pour qu’un large public prenne conscience de l’impact environnemental du numérique à l’échelle mondiale. On sait désormais que le numérique représente environ 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, deux tiers de l’énergie utilisée dans le monde, tant pour produire les équipements et infrastructures numériques que pour les faire fonctionner, étant d’origine fossile. 4 %, cela peut paraître peu au regard des services obtenus en contrepartie et des émissions évitées dans d’autres secteurs, à ceci près que les émissions dues au numérique augmentent de 9 % par an, un rythme incompatible avec les objectifs de l’Accord de Paris.
En France, du fait d’une électricité majoritairement d’origine non fossile, le numérique ne représente que 2 % des émissions nationales de GES. Une vision en trompe l’œil si l’on tient compte des émissions importées, puisque l’essentiel des équipements numériques sont produits hors de l’Hexagone, avec de l’énergie principalement carbonée et des matériaux (plastiques, métaux) dont la production dépend directement des ressources fossiles. L’étude ADEME/Arcep sur l’évaluation de l’impact environnemental du numérique en France estime ainsi que le secteur du numérique compte pour 10% de la consommation électrique française, mais que les terminaux représentent à eux seuls 79 % de l’empreinte carbone du numérique à l’échelle nationale.
Un numérique pas du tout « immatériel »
Outre la consommation croissante d’électricité due à l’explosion des usages et aux puissants « effets rebond » qui accompagnent systématiquement les gains d’efficacité énergétique, la production des équipements (serveurs, ordinateurs, smartphones, équipements de réseaux, …) mobilise pour sa part non seulement des volumes croissants, mais aussi une gamme de plus en plus étendue de ressources minérales et métalliques. Or l’extraction de ces ressources, par essence non renouvelables, est de plus en plus énergivore et génératrice de déchets et de pollution, pour deux raisons :
- la baisse des concentrations des gisements exploités. Par exemple, dans les mines de cuivre considérées aujourd’hui comme les plus « riches », la teneur en cuivre n’est que de 0,2 %. Dans une mine « riche » en indium, il n’y a que 100 grammes d’indium par tonne de minerai (concentration de 0, 01 %). Quant à l’or, on exploite aujourd’hui des gisements dont la teneur est de 0,0001 %, soit 1 gramme d’or par tonne de minerai.
- le faible taux de recyclage, dû non seulement au manque d’organisation ou de développement des filières, mais aussi à la dispersion des matières et à la faible recyclabilité des alliages complexes utilisés dans le numérique. Par exemple, le taux de recyclage de l’indium, du gallium, du tantale et du germanium qu’on trouve dans les smartphones est actuellement inférieur à 1%.
En d’autres termes, bien en amont de l’utilisation du numérique, la dématérialisation qu’il est supposé apporter se traduit par des dépenses énergétiques phénoménales, une production de déchets tout aussi phénoménale et une déplétion avérée de certaines ressources indispensables à la poursuite de la transition numérique et à la décarbonation des activités humaines.
Comment devenir numériquement « sobre » ?
Face à ces constats, la seule réponse « durable » – c’est-à-dire permettant de concilier les bénéfices du numérique et les enjeux climatiques et environnementaux – est d’adopter une démarche de sobriété numérique. Si l’on reprend l’approche du Shift Project, la sobriété numérique à l’échelle individuelle consiste à « acheter les équipements les moins puissants possibles, les changer le moins souvent possible, et réduire les usages énergivores superflus ».
Ce qui paraît réalisable au niveau individuel, moyennant un peu de bonne volonté, est beaucoup plus compliqué au niveau des organisations, et d’autant plus pour les entreprises dont la performance économique et la compétitivité reposent de plus en plus sur la numérisation des processus et, donc, un usage intensif des technologies numériques (matériel et logiciel).
>> Comment déployer la sobriété numérique quand les usages les plus courants requièrent de plus en plus de puissance de calcul, de flux de données et de capacité de stockage ?
>> Comment opter délibérément pour la frugalité dans un environnement où tout pousse à renouveler fréquemment les parcs de machines, tant pour limiter les coûts de maintenance liés à des équipements devenus obsolètes que pour prendre en charge des applications toujours plus gourmandes ?
Des actions à la portée de toutes les entreprises
L’engagement de sobriété signé en octobre 2022 par les acteurs du numérique français ou opérant en France fournit des pistes d’action que toutes les entreprises peuvent s’approprier dès maintenant. Centrés sur la réduction des consommations d’énergie, les engagements pris par les signataires concernent notamment :